Jean-Luc, Laurent, Cyril et les autres... Ils sont comme un spasme. Le reflet d'une société en souffrance. Le symptôme d'une époque où la haine de soi se réfugie dans l'outrance, les idées courtes dans la méchanceté, la peur du vide dans le bruit. Ils se disent populaires ; ils nourrissent le populisme. À l'abri de leurs volumineuses audiences, ils s'estiment légitimes pour instruire le procès des élites. Sur les plateaux de Cyril Hanouna (Touche pas à mon poste) ou de Laurent Ruquier (On n'est pas couché), comme dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, où Jean-Luc Mélenchon a fait entrer 17 députés, les « snipers » sont devenus rois. Vulgarité, dérapages verbaux, polémiques, « fake news », provocations, le tir est incessant.

Les médias sont leurs complices, volontaires ou non. Ceux qui les accueillent comme ceux qui commentent leurs frasques à longueur de journée. Les critiquer, c'est les mépriser, eux et ceux qui les écoutent. Ils ont normalisé l'humiliation - celle de leurs invités, voire de leurs animateurs - banalisé l'insulte, instauré ce que François Jost, professeur à l'université Sorbonne nouvelle et spécialiste des médias, appelle « la jouissance autour du malaise », dans un récent entretien à Ouest-France. Ils flattent la plus sombre part de nous-mêmes ; ils s'en défendent mais ils le savent, car ils sont intelligents. La télévision et la politique sont des miroirs. Ils nous les tendent avec tout leur talent.